Patrice Bonduelle

Comment aider ses enfants à acquérir un bien ?

 

L’acquisition d’un premier bien immobilier est une étape importante, souvent liée au démarrage dans la vie active. Mais les prix élevés et les difficultés de financement incitent souvent les parents à aider financièrement leurs enfants à cette occasion. Quels sont les moyens envisageables pour aider ses enfants ?

 

En achetant avec eux

Souvent la première idée est d’acheter avec l’enfant en indivision, ou plutôt en SCI. Mais disons-le d’emblée, ce schéma constitue dans la majorité des situations une solution inadaptée. Sa simplicité apparente, notamment pour la mise en place du prêt bancaire, masque plusieurs inconvénients  :

  • Est-il sain de dépendre de la décision de ses parents pour choisir son lieu de vie (acheter, revendre … ?) ;
  • En cas de décès prématuré de l’enfant, son conjoint sera moins bien protégé
  • La vente du bien acquis par la SCI, pour acheter par exemple un autre bien, entraînera l’imposition de la plus-value, à proportion de la participation détenue par les associés autres que ceux occupant le bien en qualité de résidence principale.

En leur prêtant une somme 

En l’absence de capacité financière et afin d’éviter tout déséquilibre éventuel entre les enfants, il est possible d’envisager le mécanisme du prêt « familial ». Il s’agit souvent d’une solution temporaire en attendant le jour où les parents pourront procéder à une donation (voir plus bas).

Le prêt familial notarié permet de prévoir des clauses sur-mesure sur les modalités de remboursement et d’éventuels intérêts. S’il est « sous seing privé », rédigé directement entre les parties, il devra être enregistré aux services fiscaux. Pour éviter tout risque de requalification en donation déguisée, lourdement taxée, il est recommandé de stipuler et de respecter des échéances de remboursement. En revanche, sur une courte période, il n’est pas obligatoire de prévoir des intérêts.

Un point de vigilance : le prêt familial n’est pas toujours pris en compte comme apport personnel pour l’obtention d’un prêt bancaire.

Don d’une somme ou d’autres actifs

Une donation de somme d’argent facilite l’accession immobilière par un apport personnel rassurant le banquier. Elle doit être déclarée auprès de l’administration fiscale.

  • Le « don manuel »est réalisé sans l’intervention d’un notaire avec le dépôt par le donataire auprès de l’administration fiscale(ou en ligne de l’imprimé CERFA n° 2735 – Déclaration de don manuel et de sommes d’argent – accompagné du règlement des droits de donation éventuellement dus.
  • La donation simple est un acte établi par un notaire qui se charge des formalités d’enregistrement.

Ces deux formes de donation peuvent être envisagées en présence d’un enfant unique. S’il y a plusieurs enfants, elles présentent l’inconvénient majeur de devoir faire l’objet d’un rééquilibrage au décès des parents donateurs : les plus-values réalisées par l’enfant donataire devront être repartagées avec ses frères et sœurs.

  • La donation-partage: cette donation notariée, par laquelle les parents attribuent des sommes ou actifs à l’ensemble des enfants, présente un avantage : la donation-partage est définitive.  Lors de la succession du ou des donateurs, il ne sera pas tenu compte de l’utilisation des fonds donnés et des éventuelles plus-values réalisées par les enfants.
  • La donation-partage transgénérationnelleréunit trois générations, les petits-enfants pouvant être donataires de la totalité ou d’une partie des avoirs donnés. Cette donation présente l’avantage de réaliser un saut de génération qui permet d’éviter une double fiscalité, des grands-parents vers leurs enfants puis des enfants vers leurs propres enfants.

Dans tous les cas, l’acte notarié de donation prévoira les conditions particulières que l’enfant ou le petit-enfant donataire devra respecter, telles que :

  • L’obligation d’emploi des fonds dans un actif déterminé (un actif immobilier et non des dépenses courantes…)
  • L’interdiction de mise en communauté, le bien devant rester personnel au donataire
  • Le retour du bien vers les donateurs ou leurs autres enfants en cas de décès du donataire sans descendance.

Ces charges et conditions ne peuvent pas être prévues dans un don manuel.

La donation peut aussi porter sur des valeurs mobilières, notamment si elles recèlent des plus-values importantes que l’on peut ainsi gommer en toute légalité.

Un autre type de donation est dispensé de toute déclaration auprès de l’administration : il s’agit du  présent d’usage, un don assimilé à un cadeau d’un parent à ses enfants lors d’un évènement important – anniversaire, réussite à un examen, mariage, Noël… Le montant de ce cadeau doit toutefois être mesuré et proportionnel au patrimoine des parents donataires.

 

Abattement fiscaux

Il est possible d’utiliser deux abattements fiscaux – montant de franchise jusqu’à laquelle aucun droit de donation ne sera du –  par parent et par enfant :

  • Un abattement « général » de 100 000€, franchise admise sur tout type d’actif donné.
  • Un abattement « spécial » de 31 865€, nécessitant de réunir trois conditions impératives:
    • Le donateur doit être âgé de moins de 80 ans
    • Le donataire doit être majeur
    • Les biens donnés sont uniquement des sommes d’argent
    • Les sommes sont données au cours du mois précédant ou du mois suivant la date de la donation ou du don manuel.

 

Actuellement, chacun de ces deux abattements fiscaux se renouvelle tous les 15 ans.

Exemple pratique d’un couple ayant deux enfants majeurs : chaque enfant pourra recevoir de chacun de ses parents en franchise fiscale 131 865€, soit 263 730€ par enfant, pour financer un bien immobilier.