Portrait Olivier de Berranger : Entre vent et marchés

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Article paru le 30 janvier 2025 dans l’Agefi

Le directeur général de LFDE a rejoint la boutique en 2007 en tant que gérant et y a occupé plusieurs postes avant d’en prendre la barre.

Sur l’eau comme sur les marchés financiers, Olivier de Berranger aime se mesurer aux autres, la stratégie et les aléas. Si aujourd’hui, à presque 60 ans, le directeur général de La Financière de l’Echiquier (LFDE), ne participe plus à des compétitions de voile, ni ne gère directement de fonds, il continue à éprouver une passion pour ces deux environnements.

Originaire du golfe du Morbihan, Olivier de Berranger découvre la finance à HEC Paris, avec Pierre Vernimmen, banquier d’affaires de renom, qui était son professeur de finance. Après une première expérience à l’ambassade de France à Londres, au service d’expansion économique, Olivier de Berranger intègre le Crédit Lyonnais à Paris et devient trader sur les produits dérivés et les produits de taux d’intérêt. Il travaille dans l’équipe de Jean-Marc Teurquetil, la première personne à l’avoir marqué dans sa carrière. Il évolue quinze ans au sein de la banque et participe à l’essor des produits dérivés, une période passionnante riche en créativité. Trader, il devient ensuite responsable d’équipe, avant d’être coresponsable de l’activité mondiale de dérivés sur taux d’intérêt. Entre-temps, le Crédit Lyonnais se rapproche du Crédit Agricole. Si les débuts sont stimulants, la faillite de LTCM signe la fin de l’euphorie.

En 2004, à l’approche de la quarantaine, Olivier de Berranger est tenté par l’aventure entrepreneuriale. « C’était maintenant ou jamais », se souvient-il. Il prend le large et se lance dans la distribution de produits pharmaceutiques, un milieu plus proche de celui de sa famille que de son métier. Mais l’aventure tourne court. « Au bout d’un an, je m’aperçois que je n’y arriverai pas. C’est un échec mais l’expérience a été enrichissante, analyse-t-il. Après cela, je ne me vois plus naviguer au sein d’un énorme groupe avec des structures hiérarchiques très pyramidales, une agilité plus faible. »

Olivier de Berranger devient donc consultant associé chez First Finance, une société de formation et de conseil en finance, sur les produits dérivés de taux. Pendant neuf mois, il est notamment conseiller pour les avoirs de change pour la banque centrale d’Algérie.

 

La liberté d’innover

Par des amis communs, Olivier de Berranger rencontre alors Didier Le Menestrel, celui qui a cofondé La Financière de l’Echiquier en 1987. Ce dernier lui fait part de son projet de lancer une activité sur les taux d’intérêt. LFDE est alors une maison 100 % actions. Au début, Olivier de Berranger se montre sceptique. Les discussions durent un an. Puis, en mars 2007, il se laisse convaincre et met les voiles vers LFDE. « Je retrouve alors la saveur entrepreneuriale que j’avais connue au début au Crédit Lyonnais. Je renoue avec cet état d’esprit, la liberté d’innover, de conquérir de nouveaux marchés, avec des produits distinctifs… » Et le premier fonds obligataire de LFDE est lancé en juillet 2007.

Les années s’enchaînent, certaines meilleures que d’autres, et Olivier de Berranger prend du galon. De gérant, il devient directeur des fonds diversifiés, puis directeur des investissements en 2017 et directeur général délégué en 2018. Depuis 2023, il est directeur général. Dans le même temps, LFDE se transforme considérablement. En 2018, Primonial rachète 40 % de la boutique, avant de monter à 60 % un an plus tard. En parallèle, Didier Le Menestrel organise sa sortie, effective en 2019. Puis, en 2023, LFDE est racheté par LBP AM, filiale de gestion d’actifs de La Banque Postale.

Malgré ces remous, Olivier de Berranger garde le cap. Avec le recul, il estime que le plus gros choc de l’histoire récente de LFDE a été le départ de Didier Le Menestrel. « Quand une maison fondée par un gérant charismatique, qui l’a fait grandir, est cédée à un groupe comme Primonial qui fait de l’immobilier et de la distribution aux conseillers en gestion de patrimoine, c’est le moment où le risque s’avère le plus important pour ses clients », analyse-t-il. Mais la transition se passe bien. « C’est la réussite incroyable de Didier Le Menestrel : avoir créé une boutique sur son nom, avoir réussi à la céder et que son développement se poursuive. Quand il est parti en 2019, LFDE devait gérer autour de 6,5 milliards deuros d’encours. Quand LBP AM la rachète, en 2023, nous gérons 12 milliards. La croissance a été nourrie, avec de la collecte », souligne-t-il. Aujourd’hui, avec Tocqueville Finance fusionné en son sein, LFDE affiche 26 milliards d’euros d’encours (au 31 décembre 2024).

 

Il se voit comme un « coach »

A contrario, pour Olivier de Berranger, le rapprochement de LFDE avec LBP AM ne constitue pas un si profond changement que cela. Il voit plutôt l’opération comme un projet de croissance, une source de nouvelles opportunités, notamment internationales. Il estime par ailleurs que l’esprit boutique de LFDE perdure, grâce à sa culture de performance, de service et d’innovation.

Olivier de Berranger souligne aussi la fierté des équipes de LFDE de « porter le maillot LFDE ». D’ailleurs, il se voit un peu comme un « coach » plutôt que comme un dirigeant. Et en tant que gérant de conviction, il estime que les meilleures idées émanent du terrain (bottom-up), plutôt que d’en haut (top down).

Désormais à la tête de LFDE, Olivier de Berranger continue de rencontrer Didier Le Menestrel et Stéphane Vidal, l’ancien président de Primonial, avec lesquels il dit avoir noué une « amitié profonde », et qui sont les deux voix qu’il écoute. Le dirigeant essaie aussi de passer le maximum de son temps en mer et sur l’eau, quel que soit le type d’embarcation, pour « se vider la tête » et… « réfléchir à améliorer l’avenir de LFDE ». En effet, c’est dans ces moments, loin des marchés et de tout, qu’il trouve parfois ses meilleures idées…

 

Diplômé de HEC en 1990, Olivier de Berranger a successivement occupé des postes de trader, puis de responsable de tables de trading sur les produits de taux d’intérêt cash et dérivés au Crédit Lyonnais puis chez Calyon. Il a ensuite été responsable du pôle Capital Markets chez First Finance, société de conseil et de formation. Il a rejoint La Financière de l’Echiquier (LFDE) en 2007 comme gérant obligataire. En 2017, il est nommé directeur de la gestion d’actifs et entre au comité de direction. En décembre 2023, il est nommé directeur général de LFDE